)

Comment les boues d'épuration peuvent-elles être utilisées pour produire de l'énergie ?

Comment les boues d'épuration peuvent-elles être utilisées pour produire de l'énergie ?

Posted on 03 mars 2023 by Lise Helluy

Avec l’épuisement continu de nos ressources naturelles, nous avons besoin de moyens alternatifs pour produire de l’énergie. L’un de ces moyens consiste à valoriser les boues issues de l’épuration des eaux usées afin d’en extraire le maximum de ressources. Ces boues sont l’un des déchets les plus abondants issus des stations d’épuration des eaux usées, et constituent un gisement important de nutriments et de matière organique dont la valorisation permet de se substituer aux moyens conventionnels de production d’engrais et d’électricité.

Cet article de blog explore les façons dont ces boues issues du traitement des eaux usées urbaines peuvent être valorisées, les avantages économiques et environnementaux liés à cette valorisation, et pourquoi l’utilisation de cette ressource devient de plus en plus populaire. Poursuivez votre lecture pour en savoir plus sur cette démarche vertueuse !

D'où viennent les boues d'épuration ?

Les boues d'épuration sont des déchets du traitement des eaux usées. Elles sont en grande partie constituées de matière organique et minérale. Les boues des stations d'épuration des eaux usées sont divisées en 4 types :fosse toutes eaux diagramme BIOROCK

  • Boues primaires : Elles sont issues du traitement primaire (décantation des Matières en Suspension par gravité) et composées de matière minérale et de matière organique. En assainissement collectif, ces boues sont extraites du décanteur de façon quotidienne. C’est le même principe qui est en œuvre dans les fosses toutes eaux (des filières BIOROCK mais aussi dans les fosses toutes eaux des filières BIOROTOR), mais dans le cas de l’ANC ces boues primaires ont une proportion de matière organique plus élevée que pour l’assainissement collectif, et les boues ne sont extraites que lors de la vidange de la fosses.
  • Boues physico-chimiques: Les boues sont considérées comme physico-chimiques dès lors qu’elles sont issues d’une étape de traitement où un ajout de réactif a été mis en place. Par exemple, on injecte un réactif lorsque la décantation naturelle est quasiment impossible, à cause des forces électrostatiques que les particules exercent entre elles. 
  • Boues biologiques : Elles sont composées de bactéries épuratrices présentes dans le bassin d’aération (ou bassin biologique) de la station. Elles sont issues d’un traitement secondaire dans lequel on a, de la même façon que pour les boues physico-chimiques issues du traitement primaire, injecté un réactif. Il s’agit d’un cas de figure que l’on rencontre bien plus souvent sur les stations d’épuration car cette injection a généralement pour but de faire coaguler  les ions phosphates et donc d’éliminer le phosphore pour éviter des rejets trop chargés en nutriment, qui risquent d’entrainer une eutrophisation du milieu récepteur. Finalement, les boues biologiques (= boues secondaires) sont très souvent des boues physico-chimiques.
  • Boues mixtes : Elles sont tout simplement un mélange de boues primaires et de boues secondaires. S’il y a une injection de réactif dans le traitement primaire et/ou secondaire, ces boues mixtes seront donc physico-chimiques.

Quelles soient primaires, secondaires / biologiques, physico-chimique ou non ;  toutes ces boues issues du traitement des eaux usées contiennent des matières minérales et des matières organiques, et présentent donc une part fermentescible : c’est cette part qui va permettre de valoriser les boues sous forme de biogaz.

Utilisations potentielles des boues d'épuration

engrais Les boues d’épuration, selon leur origine et leur composition, peuvent être valorisées de différentes façons. L’une des voies de valorisation les plus répandues depuis des décennies est le retour au sol des boues : l’épandage.

C’est également l’une des voies les plus encadrées par les règlementations, notamment en France. Lorsqu’elles sont considérées comme aptes, et après un traitement adapté (chaulage, compostage, digestion anaérobie, déshydratation) les boues issues du traitement des eaux usées peuvent être épandues sur les parcelles agricoles. Cette voie de valorisation permet ainsi de retourner à la terre de la matière organique et minérale, dont les nutriments piégés en grande quantité dans les boues lors du traitement des eaux usées en station d’épuration. Ce sont ces mêmes nutriments, comme l’azote et le phosphore, dont on cherche à débarrasser les eaux avant de les rejeter dans le milieu naturel. Il s’agit donc ici de substituer les boues aux engrais organo-minéraux produis industriellement, permettant de soulager la pression sur les gisements naturels – notamment celle des roches phosphatées dont l’épuisement est estimé avant la fin du siècle – et de faire entrer ces « déchets » dans une boucle vertueuse d’économie circulaire.

Dans certains cas, les boues d’épuration (après un traitement minimum sur site), sont directement dirigées vers des unités de valorisation énergétique : leur température et leur taux de matière sèche peuvent être utiles à ces unités d’incinération qui peuvent ajuster la température des fours. De telles unités de valorisation permettent, en plus de réduire la quantité de déchets, de produire de la vapeur et donc de l’électricité.

Une autre façon de valoriser les boues issues du traitement des eaux usées consiste à exploiter leur part fermentescible, via le procédé de digestion anaérobie (appelé également méthanisation). Les boues chargées en matière organiques extraites du traitement des eaux usées sont acheminées dans des enceintes de grands volumes, appelés digesteurs, et y sont stockées pendant environ 20 jours. Au terme d’un processus biochimique, les bactéries méthanogènes dégradent la matière organique des boues: cette dégradation entraîne la production de biogaz, qui est ensuite récupéré dans le ciel gazeux des digesteurs. 

Les utilisations du biogaz sont variées et dépendent, entre autres, de sa composition : 

  • il peut être brulé sur site, afin de produire de la chaleur (chauffage des locaux de la station, chauffage des digesteurs) 
  • cette production de chaleur peut également être couplée à une production d’électricité : il s’agit du procédé de cogénération, qui permet par exemple d’utiliser la chaleur sur site et de couvrir une partie des besoins en électricité
  • après un traitement (par exemple un filtre de charbon actif), le biogaz contient alors essentiellement du méthane et peut être appelé « biométhane » : ce biométhane peut être injecté dans le réseau de gaz de ville et se substituer en partie au gaz habituellement utilisé pour des usages domestiques (chauffage, cuisine etc.) ou pour alimenter des véhicules équipés pour l’utiliser comme carburant.

Lorsqu’elles sortent du processus de digestion anaérobie, les boues sont appelées « digestats » et peuvent également faire l’objet d’un retour au sol. Les producteurs de digestats peuvent même envisager de les commercialiser afin de tirer un revenu de cette ressource qui initialement, est considérée comme un déchet au sens légal.

Pour aller plus loin, certaines technologies récentes permettent même de traiter à nouveau ces digestats et d’en extraire par exemple le phosphore sous forme de struvite. Une fois encore, la récupération de cette ressource permet de soulager la tension sur les gisements naturels, en réintroduisant une matière première sur le marché. 

Défis à relever pour utiliser les boues d'épuration comme source d'énergie

La valorisation des boues d'épuration en source d'énergie fait l'objet de recherches depuis de nombreuses années, avec beaucoup de potentiel mais aussi de nombreux défis. Le coût reste une préoccupation majeure : les dépenses actuelles liées peuvent souvent être élevées en raison de l'intensité de la main-d'œuvre et de l'investissement dans les équipements nécessaires à ce processus innovant, notamment pour les unités de méthanisation.

En outre, des problèmes de sécurité majeurs peuvent subsister dans certains pays, étant donné que les boues d'épuration contiennent généralement des agents pathogènes et d'autres matières dangereuses qui pourraient mettre en danger les personnes et les animaux, s'ils ne sont pas traités de manière adéquate et stricte. En France, l'épandage est extrêmement bien encadré, voire même considéré comme contraignant. Les boues retournées au sol doivent répondre à des critères très précis, concernant à la fois les nutriments qu'elles contiennent, la matière organique, les métaux lourds, mais également les micro-organismes pathogènes. La maîtrise du risque sanitaire dépend donc de la réglementation en vigueur dans chaque pays.

Enfin, des problèmes logistiques peuvent parfois exiger des efforts supplémentaires ; par exemple, si l'emplacement d'une station d'épuration est éloigné ou inaccessible, cela peut rendre le transport des boues d'épuration difficile, voire impossible. Malgré ces difficultés, nombreux sont ceux qui affirment que la valorisation des boues d'épuration est une solution vertueuse aussi bien économiquement qu’écologiquement.

Un exemple concret de valorisation des boues d'épuration

Un certain nombre d'entreprises ont mis en œuvre avec succès le processus de production d'énergie à partir de boues d'épuration. 

A Mulhouse, le SIVOM a petit à petit investit dans ses infrastructures de traitement des eaux usées (490 000 EH) et de valorisation énergétique. Les boues issues du traitement des eaux usées de plus de 20 communes (et 2 industriels majeurs) sont injectées dans une unité de digestion anaérobie ; le biogaz est traité, puis est injecté dans le réseau de gaz de ville. Le SIVOM a commencé à se munir d’une flotte de bus de ville roulant au biogaz. Les boues après digestion peuvent être envoyées à l’unité de valorisation énergétique située juste à côté. Cette usine d'incinération produit de la vapeur et de l'électricité. Une grande partie de la vapeur créée alimente une papeterie voisine et couvre ainsi presque 70% de son besoin annuel. L'électricité produite, quant à elle, couvre les besoins de l'usine de valorisation et de la station d'épuration.

Les boues d'épuration peuvent être une ressource incroyablement précieuse pour la production d'énergie. Elles ont le potentiel de réduire les émissions de carbone, de contribuer à réduire l'élimination des déchets et d'offrir une grande variété d'utilisations au-delà de la simple production d'énergie. Malgré les nombreux avantages liés à l'utilisation des boues d'épuration, il reste un défi majeur à relever, tel que le coût. Des entreprises ont pu démontrer la réussite de la mise en œuvre de la production d'énergie renouvelable à partir de boues d'épuration et ont donné un aperçu de la manière dont d'autres organisations peuvent reproduire leur succès dans l'utilisation de cette technologie. En poursuivant les avancées technologiques dans la conversion des boues d'épuration en sources d'énergie, nous pouvons progresser vers un avenir meilleur et plus durable pour notre planète.

Et si on vous disait que BIOROCK produit localement des filières d’assainissement écologiques et non électriques pour empêcher la pollution des cours d’eau ? Discutons-en ensemble

call to action

Last 39 blogs

Show more blogs